C’était le 22 mars 2016. Trois attentats-suicides touchaient l’aéroport de Bruxelles à Zaventem et la station de métro Maelbeek. Au lendemain de cet événement, une commission d’enquête parlementaire avait été mise sur pied. Parmi les principales recommandations des parlementaires, une demande de résiliation de l’accord de 1969 qui octroyait à l’Arabie saoudite la gestion de la grande mosquée de Bruxelles. Depuis deux ans, les discussions entre le royaume et la Belgique sont vives.
Ce rapport a mis en évidence des liens étroits entre terrorisme et wahhabisme. Au grand dam de l’Arabie saoudite qui a décidé de prendre ses précautions en faisant appel à une société de lobbying bruxelloise. L’objectif de cette dernière ? Selon le journal flamand De Morgen, MSL Brussels devait tenter d’améliorer l’image du royaume saoudien et d’effacer les liens entre le terrorisme et l’Arabie saoudite.
En « on », l’Arabie saoudite condamnait fermement les attentats et s’indignait contre la « fausse idée répandue » selon laquelle le royaume répandait le fondamentalisme à travers la Belgique —depuis 1979, l’Arabie saoudite a dépensé plus de 70 milliards de dollars, en dons, pour diffuser sa doctrine dans le monde. En « off », la société de lobbying travaillait pour redorer le blason saoudien à coup d’influence, réussissant notamment à mettre le haut-fonctionnaire européen Gilles de Kerchove du côté des Saoudiens.
L’ONG Corporate Europe Observatory, qui a découvert le pot aux roses, estime que le contrat avec MSL Brussels, une filiale du groupe Publicis, a été signé en octobre 2015. La mission de l’organisme de lobbying est de promouvoir les intérêts de l’Arabie saoudite en Europe. Certes, MSL Brussels est une société qui pratique de façon légale le lobbying puisqu’elle est inscrite sur le registre de transparence de l’Union européenne. Mais elle a semble-t-il « oublié » de mentionner qu’elle travaillait pour l’Arabie saoudite alors qu’il est obligatoire de mentionner tous ses clients.
Un oubli qui n’en est pas vraiment un : MSL Brussels parle en effet d’un autre de ses clients : Qorvis, un cabinet de lobbying américain travaillant pour…. l’Arabie saoudite. Qorvis est par ailleurs filiale de Publicis. Pour sa prestation, MSL Brussels aurait signé un contrat de plus d’un million d’euros par an. Si l’entreprise de lobbying a semble-t-il connu un échec dans les négociations concernant la Grande mosquée de Bruxelles, il semblerait que la mission consistant à présenter MBS comme un grand réformateur ait été une réussite.
Et ce n’est pas tout : au-delà de la Belgique, MSL Brussels fait un véritable travail de sape au niveau européen : les eurodéputés français de droite Michèle Alliot-Marie et Rachida Dati ont par exemple, depuis 2016, systématiquement voté contre un éventuel embargo sur les armes concernant l’Arabie saoudite. Le résultat, selon l’ONG Corporate Europe Observatory, du travail de MSL Brussels.