jeudi 31 octobre 2024
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Christian Estrosi: «Je dis à mes frères musulmans: êtes-vous prêts à faire une part de sacrifices?»

LeMuslimPost : Vous êtes régulièrement accusé d’être islamophobe. Est-ce que cela vous touche, en tant qu’homme ?

Christian Estrosi : Toute critique me touche. Si je restais insensible, je ne serais pas un être humain, un démocrate, un homme de convictions et de valeurs. Maintenant, je banalise vite ces critiques car je sais qu’elles sont politiquement orientées. Je regarde et vois d’où elles viennent. Elles viennent de gens qui cherchent la provocation, de faux comptes – on sait comme internet est organisé – et, d’un autre côté, du Front national qui est mon premier ennemi et qui dit que j’en fais trop pour la communauté musulmane. A l’inverse, quelques adversaires à gauche, plus engagés, veulent récupérer des voix de musulmans et essaient de me faire passer pour quelqu’un que je ne suis pas. Je sais faire preuve de discernement au milieu de tout cela.

« La réalité ne correspond pas trop aux clichés que l’on véhicule sur moi »

A vous entendre, vous êtes plutôt un allié des musulmans…

J’ai croisé, lors du dîner du CRIF, l’imam Chalghoumi, qui m’est tombé dans les bras et qui m’a dit : « C’est formidable tout ce que tu fais pour nous ! ». Or, je trouve qu’on préfère mettre en valeur la parole d’un adversaire politique plutôt que la parole de vraies gens. J’ai bâti ici un modèle extraordinaire. J’ai, autour de moi, un Conseil du culte, j’ai toutes les religions monothéistes du département qui ont fait ce Conseil Alpes-Maritimes Fraternité dont je suis le président. Lorsque le pape François m’a invité le 24 septembre à Saint-Pierre de Rome, il m’a proposé de venir avec les familles des victimes du 14 juillet. Sur 86 familles, 56 sont venues dont une bonne vingtaine étaient de confession musulmane. J’avais avec moi le président du Conseil régional du culte musulman, des imams. On a vraiment ici des relations très apaisées et constructives. Pour moi, les musulmans font partie de la société et des citoyens niçois, point. Je suis, de plus, chaque année, invité au grand rendez-vous de la rupture du jeûne, que je célèbre dans une famille mais aussi dans un lieu de culte ou une salle. Tout comme je le fais à la synagogue, dans un temple protestant ou à la cathédrale de Nice. Vous ne trouverez pas un autre maire en France qui fait distribuer dans toutes les écoles un calendrier comme celui que l’on imprime, sur lequel vous avez toutes les fêtes des trois religions avec l’explication de leur histoire. Cela ne correspond pas trop aux clichés que l’on véhicule sur moi.

Dans les médias nationaux, vous êtes souvent invité pour « taper » sur les musulmans de France…

L’institut Montaigne a indiqué que 28 % des musulmans de citoyenneté française reconnaissaient la suprématie des lois de la religion sur les lois de la République. On a parlé de ça en disant : « Vous vous rendez compte ? » On m’a invité pour demander ce que ça m’inspirait, en espérant que je cogne. Mais j’ai dit : « Ce qui m’inspire, c’est que 48 % disent se reconnaître avant dans les lois de la République ». Ce qui signifie que notre responsabilité est de plus répondre à ces 48 % des citoyens français de confession musulmane. Ils nous demandent ici de les protéger, de les accompagner, de les aider à lutter contre toute forme de stigmatisation à l’égard de leur religion. Les autres, il faut les dénoncer mais il faut d’abord mettre en valeur ces citoyens français là. Quand vous dites que je « tape » sur les musulmans, c’est faux, je me bats contre le terrorisme. Nous nous battons tous contre cela. Aujourd’hui, pour moi, il y a un Islam politique qui essaie d’instrumentaliser une religion à des fins politiques.

En France ?

Partout ! La Tunisie a suffisamment souffert pour le savoir. Qui sont ceux qui souffrent le plus ? Ce sont les musulmans qui vivent en Irak, en Syrie, qui ont été victimes des attentats au Bardo ou à Sousse, qui est la ville jumelle de Nice, ou les musulmans qui vivent en France. Cet Islam politique frappe encore plus ceux qui sont censés être issus de la même religion. Sur la Promenade des Anglais, ils sont allés frapper indifféremment des hommes, des femmes et des enfants de toutes religions au nom d’un Islam politique. A Nice, on a dit qu’après ce qui s’était passé, il y aurait des menaces, des insultes, des actes islamophobes… C’est ici qu’on les a finalement le moins ressentis. Dans une ville de 360 000 habitants, les 86 victimes – dont 20 à 30 % de confession musulmane –, il n’y a pas une famille niçoise qui ne soit pas directement ou indirectement concernée ou touchée. Cela a resserré les liens. Cela n’a pas provoqué ce que certains imaginaient, c’est-à-dire une réaction islamophobe. Il y a eu une réaction de haine contre les auteurs de ces actes qui instrumentalisent la religion. Entre les Templiers et l’inquisition, les exactions commises au nom de la religion lors des vingt derniers siècles, ce n’est pas neutre. Même la religion juive a eu une période, un siècle et demi avant Jésus-Christ, qui était très violente. Chaque religion, à un moment, a un conflit avec elle-même. Le problème, c’est que, selon mon analyse, c’est aujourd’hui que ceux qui instrumentalisent la religion musulmane ont cette attitude, dans une période beaucoup plus dangereuse. Auparavant, on brûlait les sorcières, aujourd’hui on fait sauter une foule ou une salle de concert avec des fusils ou des bombes. Je suis convaincu que tout cela passera. C’est pour cela qu’on a besoin d’hommes et de femmes de bonne volonté, qui imposent un modèle de démocratie sur la planète, ce qui évitera des drames. Il faut aujourd’hui rassembler, apprendre aux enfants à vivre ensemble. Ce sont des enfants de la République. Mais pour le reste, chacun fait ce qu’il veut, comme il l’entend. La religion, dans l’éducation, a un rôle important pour compléter l’éducation nationale elle-même. Tous les enfants, de quelque religion que ce soit, lorsqu’ils ont un enseignement de la religion, du bien contre le mal, sont en général des enfants qui réussissent mieux dans la vie et qui, à aucun moment, ne connaissent de dérive. La religion peut apporter un supplément en termes d’éducation.

« Quelqu’un qui a une activité religieuse, qui porte les signes de sa religion, cela ne me dérange nullement »

Que pensez-vous du débat actuel sur la laïcité ?

Le débat sur la laïcité est un grand débat moderne. Quand on ne veut pas régler un problème, on se cache derrière la laïcité. Quand j’avais 10 ou 12 ans, au collège, je ne connaissais pas ce mot de « laïcité ». La loi de 1905 existait mais on n’en parlait jamais. On a laissé monter des problèmes communautaristes – et non communautaires car c’est sain de se sentir appartenir à une communauté. Et pour lutter ou ne pas avoir à prendre de position ferme sur des principes républicains, on dit « laïcité ». A les écouter, il ne faudrait porter aucun signe religieux : le voile, la kippa, la croix, etc. C’est un débat qui n’a fait que faire monter l’envie chez certains de jouer la provocation. Il y a dix ans, je ne voyais pas de burqa, de burkini l’été sur les plages à Nice. Depuis qu’on est dans ce débat sur la laïcité, on les utilise comme un mode de provocation. C’est mon sentiment. Quelqu’un qui a une activité religieuse, qui porte les signes de sa religion, cela ne me dérange nullement.

Vous avez déclaré qu’il y avait une « différence » entre voile et kippa. Vous ne mettez pas au même niveau ces deux signes religieux ?

S’ils ont une responsabilité religieuse au même niveau, je ne fais aucune différence. Qu’un rabbin soit habillé en rabbin, qu’un curé soit habillé en curé, qu’un imam soit habillé en imam, cela ne me pose pas de problème, comme un militaire est habillé en militaire. Ce qui me pose problème, c’est quand on utilise un signe religieux comme un élément de provocation.

Comment vous voyez si un voile est porté comme une provocation ou non ?

J’ai vu un reportage récemment de quelqu’un en burqa qui se faisait filmer en train de se recueillir devant le kiosque à musique où ont été déposés les hommages aux enfants de Nice. C’était de toute évidence une provocation pour faire monter des réactions de violence, pas pour apaiser.

Mais là, on parle de voile intégral, pas de foulard…

Tout cela est un problème d’assimilation. Je suis pour l’assimilation. Je suis un fils d’immigré italien. Mes parents m’ont interdit d’apprendre l’italien, alors que j’en avais envie. J’ai fait de l’anglais et de l’allemand. Je me suis longtemps demandé pourquoi mes parents et grands-parents m’ont imposé cela. C’était pour que je m’assimile, pour que je sois un vrai Français. Aujourd’hui, comment doit-on penser l’avenir de quelqu’un qui naît citoyen français ? On doit l’appeler à se construire en citoyen français, à être prêt à se battre et à mourir pour son pays, pas pour le pays dans lequel il a des origines. Nous ne réussirons à éviter les provocations qu’à ce prix-là. Cela s’appelle comment, quand on dit qu’on veut la mort du pays dans lequel on est citoyen ? De la haute trahison ! Je me demande pourquoi les lois qui existent pour haute trahison ne sont pas utilisées pour les gens qui font le djihad.

« La fragilité de la religion musulmane est de ne pas avoir une organisation structurée »

On en vient à la polémique liée aux drapeaux… Si vous regardiez un match de football entre l’Italie et l’Argentine, vous pourriez soutenir l’Italie et sortir dans la rue avec un drapeau italien pour fêter la victoire, non ?

Non, je serais pour que le meilleur gagne. Ce serait la même chose pour un match entre l’Italie et le Maroc. Je suis d’abord pour que l’équipe de France arrive en finale. Pour le reste, je regarde le jeu et je regarde celui qui menacera le plus la France. Ce serait insensé, je suis responsable politique, je montre le même respect à tous. Je me sens proche de la Tunisie, de l’Algérie, du Maroc que j’ai tous visités régulièrement, où je compte de nombreux amis.

Mais qu’est-ce qui vous a gêné dans cette histoire de drapeaux algériens au moment de l’Euro ?

Notre décision d’interdire les drapeaux ne s’appliquait pas aux drapeaux algériens, mais à tous les drapeaux. Qu’on aille au stade avec un drapeau, c’est une chose, mais qu’on défile dans les rues, c’en est une autre. Là aussi, il y avait des risques d’instrumentalisation. Les émeutes pour Théo, 95 % des gens qui sont allés défiler étaient pleins de bonnes intentions mais une minorité a cassé des vitrines, brûlé des voitures, utilisé la manifestation pour faire monter les tensions. Quand, à Nice, il y a un risque de montée de tensions, j’essaie de les éviter et de rester dans cet apaisement permanent. Cela n’avait rien à voir avec une quelconque nationalité.

Vous parliez tout à l’heure d’Islam politique. Pensez-vous que les responsables musulmans ont un rôle à jouer ?

Les responsables de l’Islam ont certes une responsabilité mais cela ne peut se faire que conjointement avec l’Etat. Quand il y a eu des manifestations contre la Palestine, ce sont eux qui ont appelé à l’apaisement lors du prêche du vendredi. Mais il faut reconnaître que la fragilité de la religion musulmane est de ne pas avoir une organisation structurée. Prenons la religion juive : en 1808, Bonaparte impose la création des consistoires, comme on a imposé le mariage civil sur le mariage catholique. Chaque religion a dû faire un effort de réforme par rapport aux lois de la République. Je dis à mes frères musulmans en citoyenneté française : êtes-vous prêts à faire une part de sacrifices à ce que vous êtes, comme d’autres religions l’ont accepté, pour faciliter votre propre organisation ?

Ce sera, selon vous, le rôle de la Fondation pour l’Islam de France ?

Par exemple. Elle peut avoir n’importe quel nom, du moment qu’il y a une hiérarchie organisée, que chaque religieux soit systématiquement accrédité par le ministère de l’Intérieur comme pour les autres religions, là où on est aujourd’hui dans une improvisation et où il y a des courants de l’Islam qui sont dangereux. Dans certains prêches, on n’utilise pas la religion pour appeler au bien mais pour déceler tout ce qu’il y a de conflictuel. Alors que si l’on lit le Livre, à aucun moment le prophète n’incite au mal. C’est simplement une volonté d’interprétation de certains.

« L’Islam de France est nécessaire, c’est à ce prix-là qu’on réglera définitivement les problèmes »

A Nice, comment est gérée l’organisation de l’Islam ?

Ici, on a bien organisé les choses. Quand nous sommes arrivés en 2008 à Nice, il y avait un désordre important. Il n’y avait pas de surfaces pour pratiquer le culte, il y avait des lieux de culte d’où les femmes étaient exclues par exemple. Le vendredi, il y avait des prières dans les rues. Partout où j’ai eu affaire à des associations constructives, qui surveillaient les imams qui venaient délivrer la prière, nous avons ouvert des discussions, accordé des baux, des surfaces.

Il y a une difficulté d’accorder des baux tout en respectant la loi de 1905, on l’a vu suite à un accord donné en 2013 par la mairie de Nice…

Le Front national m’a critiqué là-dessus mais je l’assume. C’est comme ça, je n’ai pas le droit de laisser les gens prier dans la rue parce qu’ils n’ont pas de lieu pour les accueillir, c’est de la discrimination. Mon prédécesseur, issu du Front national, a eu une politique discriminante. Cela n’a pas été difficile, on a déterminé avec les associations des règles pour que ceux qui bénéficient des baux respectent les règles. J’ai été condamné par la justice parce qu’on a accordé des baux pas assez chers mais je l’ai assumé. Aujourd’hui, il n’y a plus de prières de rue à Nice. A côté de cela, j’ai fait fermer des caves et des garages où on pratique le salafisme, avenue Saint-Joseph, en parfait accord avec ceux qui représentent le culte musulman. Je fais tout valider, les décisions que je prends, par ceux qui sont dignes de représenter le culte dans la ville.

Même l’UOIF, que vous aviez appelé à dissoudre?

Je suis plus prudent. On attribue à l’UOIF des liens avec les Frères musulmans. Mais il y a des associations labellisées UOIF qui n’ont aucun de ces liens. Cela fait partie de cette réforme dont on aurait besoin en France, pour régler cela. A partir du moment où une association de l’UOIF a une accréditation du ministère de l’Intérieur et est validée par la préfecture, je n’ai pas de raison de la contester. Il faut juste vérifier que tout est transparent. Othmane Aïssaoui, qui conduit une association labellisée par l’UOIF, je l’ai défendu après qu’il a subi des attaques odieuses et non méritées. Il n’a aucune relation avec les Frères musulmans.

L’Islam de France, vous le désirez ?

Il est nécessaire, c’est à ce prix-là qu’on réglera définitivement les problèmes.

Vous êtes en conflit avec la mosquée En-nour. Quels sont vos points de désaccord ?

Quel est le pays qui accepterait qu’une propriété du ministre des Cultes d’Arabie Saoudite serve à héberger un lieu de culte de manière gratuite ? Cela suscite des doutes. Ce n’est pas une propriété saoudienne anonyme mais une propriété personnelle du ministre des Cultes d’Arabie Saoudite. C’est donc la propriété d’un wahhabite dont le salafisme est un dérivé. Nous sommes dans la cinquième ville de France, j’ai accordé des baux dans des bâtiments municipaux, cela se passe bien, on a supprimé les prières de rue, tout le monde participe à la vie municipale. Et à un moment, une association se voit mettre à disposition des murs par le ministre des Cultes d’Arabie Saoudite wahhabite. Je ne suis pas d’accord. La municipalité a d’autres projets : nous sommes au cœur d’une technopole où j’ai demandé qu’il n’y ait ni lieu de culte ni permanence politique. Je suis prêt à discuter de tout, mais pas là et pas comme ça. On m’a répondu : « Monsieur, ça m’est égal, je fais ce que je veux ! ». Dois-je prendre cela comme la volonté d’organiser une activité apaisée dans le respect de la collectivité ou comme un lieu à risques ? Quand je demande les sources de financement des travaux et que je découvre que ceux-ci ont été facturés par des sociétés constituées juste avant les travaux et qui ont déposé leur bilan juste après, cela me pose un vrai problème. Ce qu’ils ont fait, ils l’ont fait contre la municipalité mais aussi contre 80 % des représentants du culte musulman qui n’ont pas cautionné cela. Avec l’accord des différents représentants, j’ai fait voter par le conseil municipal la mise à disposition d’un espace foncier dans le même quartier mais pas dans l’espace de la technopole, pour que l’ouest de Nice soit parfaitement couvert avec un espace qui puisse accueillir 1 200 fidèles dans un lieu digne de ce nom, avec un lieu d’abattage. Cela a d’ailleurs été dénoncé par les extrémistes de l’opposition.

« Imaginons que nous n’ayons pas Israël pour lutter contre le terrorisme, l’Europe serait encore plus menacée »

Le halal, justement, à la cantine. Comment vous gérez cela à Nice ?

Depuis trente ans, jusqu’en 2010, les cantines étaient gérées par des sociétés privées pour les repas des 163 écoles de la ville. Ce n’était pas de très bonne qualité, et que ce soit pour des problèmes liés à l’éducation ou à des allergies mais aussi pour des problèmes d’équilibre nutritionnel, j’ai voulu montrer que nous étions avant-gardistes sur le sujet. Mais pas question de faire du halal ou du casher. Mais un aliment qui serait une provocation à l’éducation d’un enfant, je ne veux pas qu’on exerce cette provocation. Si une famille en début d’année scolaire indique que son enfant ne mange pas de porc ou de crustacés, eh bien, nous veillons à proposer un menu qui lui corresponde. A tous ceux qui veulent un menu unique et qui font cette proposition pour la présidentielle, même au sein de ma famille politique, je dis que personne ne viendra m’imposer dans ma ville comment je dois faire.

Vous avez annoncé porter plainte contre David Thomson, qui indique dans son livre « Les Revenants » que Nice est un des berceaux du terrorisme et que vous n’aviez pas neutralisé Omar Omsen, un recruteur pour le djihad…

Oui, j’irai jusqu’au bout. Ce type est gonflé. Il met dans son livre le témoignage d’un personnage, réel ou imaginaire, qui dit que j’étais responsable de sa radicalisation. Je serais un islamophobe pour les uns et un pro-radicalisation pour les autres, c’est compliqué. Nous avons été la première ville en France à prendre l’initiative de créer une cellule de lutte contre la radicalisation, j’ai apporté au procureur de la République je ne sais combien de signalements qu’il n’a pas pris en compte. Comment je les apporte ? Par des parents affolés, grâce à cette cellule, à des présidents de clubs sportifs qui voient s’infiltrer des hommes qui viennent sensibiliser à l’intérieur des vestiaires. Quand je vois que celui qui a pris des dispositions avant les autres pour lutter contre ce phénomène de radicalisation, qu’un journaliste ose mettre cela dans un livre, je ne le lâcherai pas, c’est clair !

On vous reproche vos relations privilégiées avec Israël. Vous comprenez que votre don à une association accusée de favoriser la colonisation puisse choquer ?

On ne me reproche pas d’aller soutenir la Tunisie et d’avoir aidé la ville de Sousse quand elle a subi un attentat, d’avoir témoigné ma solidarité, d’avoir construit un orphelinat ou une école au Burkina Faso, quand je soutiens l’hôpital d’Abidjan ou une école sénégalaise. Il y a eu de dramatiques incendies en Israël, j’apporte 50 000 euros pour aider au reboisement d’un territoire israélien, on me le reproche.

Mais c’est bien plus que cela, le KKL soutient et symbolise la colonisation…

Le KKL est reconnu par l’ONU, il existe depuis plus d’un siècle et a la charge du reboisement. S’il y a une autre association qui s’occupe du reboisement, dites-le moi. Je m’adresse donc à celle-ci. On est là face à un problème écologique pour tous, notre aide représente 5 000 arbres. C’est odieux de me reprocher d’aider à la replantation de 5 000 arbres sur un territoire dévasté. Aider une ville marocaine, libanaise ou tunisienne, en tant que président d’Euromed, à hauteur de plusieurs millions d’euros, c’est normal. Mais 5 000 arbres en Israël, ce n’est pas normal ? Là, je dois l’interpréter comment ? Si on veut l’apaisement entre tout le monde, il ne faut pas avoir une attitude qui stigmatise. Pourquoi stigmatiser Israël ? C’est un pays ami qui lutte contre le terrorisme. Le Hamas, les Frères musulmans, Boko Haram, Al Qaïda, Daesh… C’est pareil ! Imaginons que nous n’ayons pas Israël pour lutter contre le terrorisme, l’Europe serait encore plus menacée. Comme l’Egypte. Je n’ai vu personne en Egypte dénoncer quelque attitude de ma part, tant les relations entre l’Egypte et Israël sont liées. Quand l’Egypte aide Israël à lutter contre la construction de tunnels, je n’entends pas ceux qui me dénoncent quand j’aide à la replantation dénoncer le gouvernement égyptien. Partout où il y a des souffrances, nous sommes solidaires sans distinction du régime ou de la religion majoritaire. Je suis au-dessus de tout ça et j’entends être respecté pour cela.

« Oui, l’islamophobie existe, on doit lutter et condamner cela »

Vous parlez de racisme anti-Arabes dans votre livre mais l’islamophobie existe. Pourquoi ne pas employer ce terme ?

(Long silence) Oui, elle existe. On doit lutter et condamner cela, et je le condamne sévèrement quand c’est nécessaire. C’est inacceptable mais il y a, en contrepartie, un antisémitisme réel. On l’a vu avec le gang des barbares. L’un ne peut pas justifier l’autre. Et il y a des actes anti-Français. Le djihad est un acte anti-Français.

Aujourd’hui, qui sont vos ennemis ?

J’ai un ennemi, c’est le Front national. D’ailleurs, je le redis : si François Fillon n’est pas au second tour, j’appellerai à voter pour celui qui sera au second tour contre Marine Le Pen. Sans hésitation. Je sais les ravages de la pensée du Front national sur l’histoire de mon pays. C’est ce que je crains de pire. Mon combat politique est là aussi, je vois cette montée dont les médias se soucient très peu. Ils sont indulgents à l’égard de ce que les membres du Front national sont, de ce qu’ils incarnent et de ce qu’ils proposent.

Propos recueillis par Yunes Bel Hadj et Frédéric Geldhof. © Photo : Ville de Nice. REPRODUCTION INTERDITE SANS AUTORISATION

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