L’universitaire et écrivain d’origine iranienne, Reza Aslan est intervenu sur The Secret Life of Muslims (La Vie Secrète des Musulmans), la nouvelle série du réalisateur Joshua Seftel, diffusée à travers le site web Vox. Il discute des moyens que l’on pourrait utiliser afin de changer la vision qu’a le monde, et notamment celle qu’ont les Américains, des Musulmans.
« Dans les années 1980, être musulman était comme être un martien ». Reza Aslan a grandi au sein d’une communauté mexicaine et à défaut de pouvoir expliquer ses origines, il se présentait aussi comme Mexicain. Les Musulmans devaient faire profil bas.
Cela dit, avec le temps, il ressentait de plus en plus le besoin de s’exprimer et de se trouver spirituellement. C’est à partir de là qu’il commence à se documenter et finit par lire le Coran. Il réalise que ce qui y est écrit correspond parfaitement à ce à quoi il croit, il ne savait juste pas qu’il existait un mot reflétant ses croyances. Il poursuit alors des études de théologie et s’y spécialise.
« Vous parlez d’1.6 milliard de personnes (musulmanes), ne généralisez pas »
La chaine d’information CNN a souvent fait appel à Reza Aslan afin de clarifier certains points concernant l’Islam à travers des questions qui reflètent l’opinion publique, telles que : « Est-ce que l’Islam promeut la violence ? », « Le système judiciaire dans « les pays musulmans », est –t-il selon vous d’une certaine manière plus primitif et subjuguerait-il plus les femmes que dans les autres pays ? » etc.
« Le plus dur pour moi quand je suis interviewé et de cacher mon étonnement », dit-il.
Il raconte comment la chaine d’information Fox News a discrédité son habilité à discuter et à écrire sur les fondateurs du christianisme : en tant que musulman, il ne serait pas en position de pouvoir disserter sur une autre religion que la sienne. L’universitaire et écrivain rétorque que, parmi d’autres diplômes, il possède un Master en études théologiques obtenu à Harvard Divinity School et une maitrise parfaite du grec biblique.
Après le passage télévisé et l’échange sur Fox News, il raconte : qu’en se réveillant le lendemain, il voit que plus de 10 000 nouvelles personnes l’ont suivi sur son compte Twitter et qu’on lui a laissé de nombreux commentaires positifs, en grande partie écrits par des Musulmans : « On a maintenant la preuve de la façon dont on nous voit, et la manière dont on parle de nous la plupart du temps », « Voilà ce que ça fait d’être musulman aux Etats-Unis ». « Les réactions négatives se faisaient néanmoins beaucoup plus entendre, j’ai maintenant un dossier entier rempli de menaces de mort », tient-il à préciser.
Toucher l’humain
« 10 ans à être le musulman favoris des chaînes télévisés sans faire le moindre bien. La bigoterie n’est pas le résultat de l’ignorance mais le résultat de la peur, et la peur est un sentiment imperméable à l’information», clarifie-t-il. « Le seul moyen de dissiper cette peur est de faire en sorte que les gens apprennent à connaitre quelqu’un dont ils ont peur ».
Reza Aslan, aussi producteur de séries télévisées (The Leftovers, Believer), travaille actuellement sur une comédie avec Andrew Reich, le producteur exécutif de la série Friends. Son projet (dont le nom n’a pas encore été dévoilé) a été acheté par ABC en août 2016, et raconte l’histoire d’une famille américano-iranienne de San Jose en Californie, qui aurait une manière très différente de traiter des questions de traditions et d’identités.
« Pendant très longtemps, les seuls musulmans que l’on voyait à la télévision étaient des méchants qui criaient « Allah w Akbar » avant de se faire exploser. De l’autre côté, il y avait quelques bons musulmans, comme dans le film Body of Lies qui travaillaient avec la CIA, mais qui après 3 minutes de film, se faisaient tuer. »
L’idée est de pouvoir montrer une image des Musulmans entière et non dualiste par le biais de la vidéo. Pouvoir parler d’une majorité et non de la minorité mise en avant par les médias ou encore l’image complètement erronée, diffusée par l’Etat Islamique. Pouvoir refléter la réalité de la religion musulmane dont les pratiquants ne sont pas différents des autres.
« En l’espace de trois ans, on est passé d’une majorité impressionnante à être contre le mariage homosexuel à une majorité tout aussi impressionnante à soutenir le mariage homosexuel », rappelle Reza Aslan. « Ce sont les séries comme Will and Grace ou Modern Family qui ont changé les mentalités. Regarder des gays à la télévision être « normaux », avec les mêmes problèmes qu’eux, les voir comme des êtres humains », voilà ce qui aiderait à combattre l’islamophobie.
C’est à travers la culture pop, les films, la télévision que les mentalités commenceront à changer.