Outre-Manche, les instances de régulation de la presse ont classé la plainte d’une journaliste voilée qui avait été traitée par The Sun comme un « soutien aux terroristes » de Daesh.
L’avis de Kelvin MacKenzie, éditorialiste au Sun, était « sans aucun doute offensant », mais il a simplement « exprimé son point de vue. » Voilà en substance le message d’Ipso, l’organisation de régulation de la presse indépendante au Royaume-Uni, qui vient de prononcer le classement sans suite de la plainte d’une présentatrice de Channel 4, Fatima Manji, contre le journaliste. L’histoire remonte au 18 juillet dernier. L’éditorialiste accuse alors, dans les colonnes de son journal, Channel 4 de « stupidité éditoriale. » Celui-ci reprochait à la chaîne d’avoir mis à l’antenne une femme en hijab à l’antenne, ce qu’il estimait être un signe de « soutien aux terroristes » qui avaient frappé Nice quelques jours plus tôt.
La liberté d’expression n’est pas un droit à discriminer
Que la plainte soit classée est une surprise. L’article 12 du code de déontologie des médias stipule en effet que la presse doit éviter toute « référence préjudiciable ou péjorative à la race, la couleur, la religion, le sexe, l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle d’un individu. » Ben de Pear, directeur de la chaîne, se dit « consterné » par la décision d’Ipso. « Nous sommes d’accord que la liberté d’expression est un droit fondamental, dit-il, mais nous ne croyons pas qu’elle devrait être utilisée comme un droit d’incitation à la haine ou de discrimination. » Pour le dirigeant, les tentatives de MacKenzie d’assimiler le port d’un hijab avec un soutien au terrorisme « n’ont pas leur place dans une société bien informée et tolérante. » Avant de rappeler que Fatima Manji n’est pas qu’un hijab, c’est avant tout une présentatrice compétente. « Chez Channel 4, nous employons des journalistes en fonction de leurs compétences journalistiques et non de leur appartenance ethnique. Nous ne voyons aucune raison pour laquelle une journaliste musulmane devrait être empêchée de couvrir des événements. » Pour Ben de Pear, « Fatima continuera de présenter le journal télévision avec impartialité. » N’en déplaise au Sun, qui peut donc continuer à verser dans l’islamophobie et les amalgames sans être inquiété.