Deux mois après l’interpellation de treize membres d’un groupuscule d’extrême-droite visant à commettre des attentats en France contre les musulmans, les procès-verbaux des militants, consultés par le Monde, permettent de mieux connaître leurs profils mais aussi leurs réelles intentions.
Agés de 32 à 69 ans, ces dix hommes et trois femmes sont des entrepreneurs, des ex-militaires, un mathématicien… des profils variés, souvent sans appartenance à des partis politiques. Mais le groupe recrutait surtout des personnes d’un âge avancé, et plus particulièrement chez les anciens militaires et policiers. Certains détenaient même des armes non déclarées.
La plupart d’entre eux ont toujours minimisés leurs intentions meurtrières contre les musulmans, évoquant de simples « fantasmes », des « vœux pieux ». « On a tous nos démons », a même confié l’un d’eux aux enquêteurs.
Pourtant, les projets du groupe démontrent une réelle haine envers l’islam et un passage à l’acte très probable. Des débuts de préparatifs d’attentats ont en effet été découverts par les enquêteurs lors de leurs investigations. Le journal le Monde évoque même « de véritables bouffées meurtrières pour certains ».
Plusieurs membres de l’organisation avaient déjà sérieusement envisagé de tuer « deux-cents imams radicaux », « d’empoisonner » de la nourriture halal dans les supermarchés, ou encore de jeter des grenades sur des fidèles lors de prières de rue ou dans des librairies de littérature salafiste… Des projets qui auraient été souvent évoqués et détaillés en réunion.
« Ce n’était pas très bien défini, mais, à chaque fin de réunion, (Bernard S., responsable de la section parisienne d’AFO, Action des Forces Opérationnelles, en détention provisoire) rappelait qu’on devait avancer dans le recrutement, dans la localisation des cibles, etc. Toutes les demi-heures, il répétait la même chose, en boucle. L’association de malfaiteurs terroriste. C’est clairement ce que voulait faire le groupe. Après, c’est des mythos les mecs, ils sont allumés du cerveau. Ils pensent qu’on peut buter des gens comme ça. Je me demande pourquoi je ne me suis pas barré en courant », a confié un des militants cité par le Monde, le seul à avoir avoué l’ensemble des faits reprochés.
L’objectif d’AFO était à la fois de « se venger des attentats commis en France ces dernières années » mais aussi de se « protéger » de l’Islam et d’attentats à venir.
Une dizaine de stages pour « résister à l’Islam » ont par exemple été organisés dont un à Chablis (Yonne, nord-est). Ces stages comportaient des formations de self-défense, de topographie, d’usage de radio, de nœuds marins, etc.
« J’ai pris peur suite aux attentats. J’ai fait ça dans un objectif de protéger ma famille (…) A partir de là, j’ai trouvé ce que je recherchais car ces gens-là m’apportaient la possibilité de pouvoir fuir si jamais il y avait des conflits majeurs en France, je parle de conflits avec l’Islam », témoigne l’un des membres du groupe.
Les premiers résultats de l’enquête révèlent enfin qu’AFO, crée en août 2017, n’en était qu’à ses débuts. Contrairement à d’autres associations officielles proches des milieux d’extrême droite et identitaires, le groupuscule « était dénué de statuts et n’aura survécu que quelques mois », précise Le Monde.
Un groupe peu organisé mais dont les militants ont tout de même été mis en examen pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ». La plupart d’entre eux ont cependant été remis en liberté et placés sous contrôle judiciaire faute de charges suffisantes. Leur chef revendiqué Guy Sibra, a lui aussi été libéré.