Un collectif de comédiens à qui le préfet de Seine-Saint-Denis, délégué à l’égalité des chances, avait promis une régularisation « au fil de l’eau » voit finalement vingt-et-un de ses membres être obligés de quitter le territoire.
La directions régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) de Seine-Saint-Denis, qui a de réaliser des « régularisations par le travail », vient de refuser la régularisation de vingt-et-une personnes d’un collectif de comédiens. Celui-ci, depuis 2015, a connu un gros succès au théâtre de la Commune avec la pièce « 81 avenue Victor Hugo. » Si, sur scène, tout se passe pour le mieux — le spectacle est programmé au Centre dramatique national de Sartrouville dans deux semaines —, la vie quotidienne de ces sans-papiers s’annonce de plus en plus compliquée : leur régularisation ne se fera pas, alors que Didier Leschi, alors préfet délégué à l’égalité des chances de Seine-Saint-Denis, avait promis de régulariser « au fil de l’eau » les membres de la troupe, « en fonction des promesses d’embauche d’employeurs. »
« Je suis censée faire quoi ? »
Un an plus tard, rien n’a été fait. Pire, une décision de justice oblige les migrants du collectif à quitter le territoire. Dans une interview accordée au Bondy Blog, Fadela Benrabia, qui a succédé à Didier Leschi au poste de préfet délégué à l’égalité des chances, confirme la nouvelle. « Personne ne s’est engagé à régulariser un collectif », rétorque-t-elle, arguant que son « principe est d’appliquer la loi. » « On a examiné les dossiers, on les a réexaminés. On est à deux tiers de régularisations, c’est énorme », explique Fadela Benrabia, qui ne veut pas faire d’état d’âme. « Je suis censée faire quoi ? », demande la déléguée à l’égalité des chances, qui estime que la promesse faite par Didier Leschi « n’est pas (son) problème. » Pour les vingt-et-une personnes qui ont essuyé un refus, « c’est un refus, c’est tout », explique-t-elle froidement.
Une situation cocasse. Car « 81 avenue Victor Hugo » raconte justement le quotidien de clandestins en France, à Aubervilliers. Une pièce touchante, mais aussi dramatique. Autant que la récente décision de justice, qui prévoit, indique Le Monde, l’expulsion du 81 avenue Victor-Hugo des membres du collectif, alors que le bâtiment devrait devenir une plateforme d’accueil pour les demandeurs d’asile. Une plateforme sur laquelle le collectif n’est donc pas le bienvenu. « Je me suis occupée de ce collectif qui n’a rien à voir avec la situation d’urgence de migrants qui relèvent du droit d’asile, qui fuient leur pays parce que c’est la guerre », argumente Fadela Benrabia aux journalistes du Bondy Blog, qui dit ne pas vouloir entrer dans une quelconque polémique. « J’ai un grand devoir de réserve sur toutes les questions politiques », conclut-elle.