Les théories conspirationnistes n’auront jamais eu autant le vent en poupe en Turquie. Pour preuve, le branle-bas général suscité par une publicité pour la célèbre marque turque de biscuits, Ülker, diffusée samedi dernier sur internet, à l’occasion du poisson d’Avril. La coïncidence de la date n’a semble-t-il pas sauté aux yeux des internautes, qui ont causé une vague de panique pour avoir décelé dans cette publicité un message secret sur une tentative de coup d’Etat. Dans son contenu, l’annonce, faite de dessins animés, relatait une série de situations inconfortables typiquement vécues par les benjamins d’une fratrie. En conclusion, les messages suivants ont été déroulés : « L’heure de la vengeance se rapproche » et « Je te surprendrai ». Cela a suffi pour que plusieurs dizaines de pro-Erdogan, les plus convaincus de l’existence d’un « cabinet noir » à la turque, se rassemblent devant une des résidences présidentielles à Istanbul, dans le but d’assurer une nouvelle « garde de la démocratie », en référence aux foules massives mobilisées par le gouvernement lors de la tentative de coup d’Etat avortée du 15 juillet dernier.
« L’heure de la vengeance se rapproche »
Parmi les premiers à se présenter devant la résidence de Recep Tayyip Erdogan, Metin Külünk, un diputé du parti islamiste AKP, a déclaré au micro de CNN, en guise de justification, que “cette nation n’a pas oublié et n’oubliera jamais la nuit du putsh », au cours de laquelle plus de 240 personnes ont été tuées. Cette polémique engendrée par l’annonce publicitaire d’un géant de l’industrie agroalimentaire turque a été prise au sérieux jusqu’au sommet de l’Etat. « Il y a un sentiment d’anxiété dans la société et cette publicité génère de l’anxiété », a ainsi commenté le Premier ministre Binali Yildrim. Même l’entreprise s’est fendue d’un communiqué dans lequel elle estime que son message a été « déformé ». « La publicité portait sur la rivalité fraternelle entre les membres d’une famille, surtout entre frères et soeurs. Il n’y a aucun lien avec les problématiques soulevées dans les réseaux sociaux ». En dépit de ce geste d’apaisement, Ülker n’a pas fini de payer pour sa publicité : le cours de l’action a chuté de 4,7% dès la réouverture de la bourse, ce lundi matin.